DEMAIN SERA UN AUTRE JOUR!

Publié le par Alain

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Retour à la case départ!


              Un dimanche de Septembre: « Vieni a casa! » (viens à la maison). C'est Giuseppe qui m'appelle! Dans le salon, Papa, Mamma et ce que je m'attendais à trouver: Paolo et une charmante jeune fille!
             « Mamma, Papa, Giuseppe, Alain, je vous présente Francesca. Nous envisageons de nous marier!... » Meilleur ami de Paolo, j'étais déjà au courant.
             Francesca est une jolie milanaise au fin visage souriant, de longs cheveux noirs surmontent un petit front bombé et têtu, des yeux bleus, des lèvres roses. Fille d'un célèbre architecte son entrée dans la famille est accueillie avec joie!
             Les fiançailles, passage obligé en Italie, furent célébrées en Novembre. Cérémonie joyeuse en présence des deux familles. Mariage prévu au mois de Mai suivant.
             Il y avait pourtant un léger ennui dont je me gardais bien de parler à mon ami! Je ne sympathisais pas avec Francesca. Nos rapports étaient amicaux mais superficiels et empreint d'une certain embarras!
            Nos camions courent l'Europe. Un printemps précoce annonçait le mariage proche. Depuis deux semaines quelque chose ombrait le front de Paolo. Lui si loquace et rieur devenait taciturne, soucieux! Puis un samedi, l'aveu: « Francesca veut que j'arrête la route! Vuole il suo marito alla casa, non in un autocarro! » (Elle veut son mari à la maison, pas dans un camion!)
           Je vois Papa accuser le coup! « Cosa farai? » (Que vas-tu faire?) « Son père m'offre un bon travail... » Il y a de la gène dans cette réponse. « Bene! Si c'est ce que tu désires!... » Il se tourne vers moi: «  Alain?... » « Comme vous voulez Papa. Je vais continue... » Paolo m'interrompt: « Alain, tu désapprouves? » « Non! Tu dois choisir le meilleur pour toi, je souhaite simplement que tu restes mon ami... ».
           Dernier voyage avec Paolo!... Demain il va se marier! Il est à la fois anxieux et rayonnant! Malgré un légère nostalgie, je partage sa joie.
           Très belle cérémonie, je n'avais jamais vu Paolo aussi angoissé, coincé entre rire et pleurs, presque incapable de passer l'alliance au doigt de sa femme! Long repas à l'italienne. Les mariés se sont éclipsés longtemps avant la fin des agapes!...
            Le week-end, après les soins à mon Magirus, je prends l'habitude d'une courte visite à Paolo, devenu chef de parc d'une entreprise milanaise. Je ne m'attarde guère. J'éprouve toujours une gène inexplicable devant Francesca... Le dimanche j'accompagne Giuseppe au San Siro, c'est très rarement que Paolo peut se joindre à nous! Sans nous en rendre compte nos vies divergent... pourtant l'amitié reste solide et perdure.
            Newhaven! J'attends le ferry pour Dieppe et le chauffeur qui remplace Paolo, Renato un brave garçon qui n'a que deux défauts: aucun sens de l'exactitude ni de l'humour. Mon copain me manque et je ne vois plus le Fiat rouge et noir avec le même regard.
            Le travail devient routine. J'ai la pénible sensation que Papa se contente de gérer l'acquit, qu'il n'innove plus!
           Cinq mois se sont enfuis! Samedi après-midi, nous sommes tous réunis dans le salon. Mamma sert le café, Francesca est appuyée sur l'épaule de Paolo, Giuseppe et moi avons allumé une cigarette...
            Papa rompt le silence: « Ecco! me sento stancato, (Voilà, je me sens fatigué) Je pense à me retirer. La Société marche bien... Si l'un de vous veux la prendre en main? » Une pause: « Paolo?... » Mon ami n'a pas le temps de répondre, Francesca déclare: « Lui ha un buon lavoro! Non ha alcune ragioni di cambiare! » (Il a un bon travail! Il n'a aucune raisons de changer!) Elle sourit. Tête basse, Paolo ne contredit pas!
            « Alain?... Giuseppe?... » Hélas, nous n'en avons pas les capacités, ni administratives, ni pécuniaire. Accepter serai courir à l'échec. Je suis conscient de la grande déception de Papa et Mamma.
            « Bene! Je vais céder la société à Biaggi et mettre la propriété en vente. Alain, tu pourras travailler pour lui! » Pas question, je connais ce gros patron sanguin. Il crie beaucoup trop pour moi!...
            Je viens de mettre la dernière valise dans la Fiat rose*. La cour est vide de camions, les chauffeurs de Biaggi sont venus les chercher. J'ai dit adieu à mon Magirus noir et rouge... Dernier « Au revoir! » à Papa et Mamma qui vont quitter la villa dans quelques heures. Je passe les pilastres de sortie ou s'accroche une grande pancarte: ''Vendesi'' (A vendre!).
            Avec une grosse boule de nostalgie au creux de l'estomac, je vais voir Paolo sur son lieu de travail, loin de Francesca! Séparation sans que notre amitié en souffre! Le destin joue parfois avec l'homme!
            Instinctivement je prends pour partir la route par laquelle je suis venu. Un coup d'oeil sur la silhouette du San Siro, la ''tengentiale'', autoroute pour Genova... La petite Fiat se dirige vers la France... Autostrada del Sole vers Ventimiglia. Plus j'approche de la frontière, plus le temps se fait menaçant!
           Menton, autoroute vers Nice, la pluie fait son apparition. J'enclenche les essuie-glace. Je constate alors que si ma vue reste embuée les intempéries ne sont pas seules en cause...


*Voir ''La vache... et le routier.

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C
Quitter une famille d'accueil comme celle-ci a dû être un véritable déchirement et j'espère que tu es toujours resté en contact avec tes amis!<br /> Biz du Pays d'Auge<br /> Caro
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M
Magnifiquement conté, comme toujours !<br /> C'est un constat, bien souvent l'amitié de deux hommes se dilue dans le temps, dès que l'un d'eux se marie...<br /> Ah ! femme possessive...<br /> Superbe, Monsieur<br /> Amitié
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J
C'est triste, en effet. On sentait bien que tu les aimais bien et qu'ils étaient pour toi comme une deuxième famille. j'espère que tu garderas le contact avec eux! amitiés
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R
un p'tit beaujour en passant<br /> et douce semaine à toi aussi.
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K
la suite, c'est quand ???
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