L'ART D'ETRE ITALIEN!

Publié le par Alain

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Franco-italien où Italo-français?

                  Autoroute Turin-Milan. Jeudi, onze heures du soir, depuis deux heures je me traîne à trente à l'heure par la faute d'un brouillard comme seule l'Italie sait en produire. Dans les rétros je devine vaguement les lumières d'un véhicule qui me suit.
        Une aire de service illuminée se présente, je peux enfin voir ou je met mes roues. Indéniable moment de détente! Je décide, avant de prendre un peu de repos, d'aller déguster un café au Pavési. Je saute à la volée de la cabine, ma manche s'accroche à un machin quelconque, déséquilibré je n'évite la chute que parce que le tissus se déchire. Un brin énervé je claque la portière!
        Café bu je retourne, paisible, vers ma couchette. Débutent les ennuis quand je cherche mes clés, rien dans les poches! En fermant brutalement je les ai laissées à l'intérieur, me voilà « bouclé dehors ». Pas d'affolement: comme tous routiers j'ai un double du trousseau caché dans le pare-choc pour les cas ou.... sauf que là je me souviens l'avoir retiré quand j'ai passé le bahut au lavage. Et pas remis ensuite!
       Direction la station-service, le mécano aura peut-être une solution. Il sourit quand je lui conte ma mésaventure: « Ho chiavi di porta, andiamo, proveremo di aprire! » (J'ai des clés de portière, allons, nous essaierons d'ouvrir!)
       Essai raté. La serrure refuse toute coopération. Je remercie mon dépanneur et décide de passer la nuit au Pavési. Milan est proche, je téléphonerai à ''Papa'' demain!
       Je sommeille, mal assis sur une chaise, quand le mécano arrive suivi d'une espèce de grand échalas plutôt âgé.. «Mio amico dice che per mille lires puo aprire la sua porta! Qui interessa lei? » (Mon ami dit que pour mille lires il peut ouvrir ta portière. Ca t'intéresse? »)
       Et comment! Trois minutes après l'échalas s'active, debout sur le marche-pied. Un fil de fer introduit dans la serrure par des mains tremblantes la convainc. Elle cède sans trop résister. Nanti de ses mille lires le ''serrurier'' s'éloigne. « Il est doué ton collègue! » « Si, rigole le mécano, il faisait plus rapidement sur les voitures il y a quelques années! » Un temps: « Ora non corre abbastanza rapidamente! » (Maintenant il ne court plus assez vite!) Bella Italia! Je m'intègre...
        S'insérer dans un monde nouveau, même proche du notre, pose parfois quelques problèmes! Si Paolo, Papa, Mamma et ''cugino'' Giuseppe n'avaient pas amorti, par leur gentillesse, le choc du dépaysement, mon entrée dans la vie à l'italienne aurait été moins facile.
         Petit exemple: Mamma ayant besoin de sel pour la cuisine me demanda d'aller en chercher. Non! Pas chez l'épicier mais au bureau de tabac! Pas évident pour un français!
        Mon acclimatation commença au ''Caffè Marcello'' ou Giuseppe, quand j'attendais l'autorisation de travail, me présenta à ses amis. J'y fus reçu amicalement par des amateurs de ''calcio'', supporters sans réserve de l'Inter de Milan. Avec eux le match du dimanche passé durait jusqu'au vendredi, celui du dimanche à venir commençait le samedi!
        Suis-je devenu en partie milanais le jour ou, accoudé au comptoir en dégustant un café je déclarai, à propos d'une rencontre entre l'Inter et un club anglais: « La nostra squadra non puo perdere! »? (notre équipe ne peut pas perdre!). Je m'intègre...
         Les kilomètres et les jours défilent. Ce vendredi je fais un dédouanement chez Gondrand à Turin. La charmante (Hé! je ne suis pas aveugle!) ''agent des douanes'' à qui j'ai remis les documents m'a prévenue: « Vous en avez au moins pour cinq heures! » Fort de ce renseignement j'entreprends de visiter un peu de cette ville que je connais mal.
         Le temps est agréable, je flâne en admirant les belles façades anciennes, leurs sculptures, leurs balcons étonnants.
         Le hasard guidant mes pas, je me retrouve sur le ''Corso Giullo Cesare'', un large boulevard ou de nombreux cafés tendent leurs terrasses aux touristes. Je me laisse tenter et m'installe, à l'ombre d'arbres magnifiques, pour déguster ''una cassata'' (glace aux fruits confits).
         Mon regard est attiré par le manège d'un touriste. Sur le terre-plein central qui sépare les deux voies du boulevard il se prépare à photographier la perspective vers la ''Piazza Derna'', un très beau point de vue!
       Il installe avec soin un trépied, y fixe un bel appareil, avance, recule, à gauche, à droite et ayant trouvé la position idéale, sort sa cellule-photo pour calculer le temps de pose.
      A cet instant un gamin en jeans et polo rayé noir et blanc, (Les couleurs de la Juventus de Turin!) se lance en courant à travers la circulation, le bras en arrondi il se saisit à la volée du trépied et de l'appareil, coupe l'autre voie au grand dam des automobilistes, disparaît dans la foule!
      Le photographe, ahuri et médusé, n'a pas esquissé un geste. Là, je sais, je ne devrais pas!... Non je ne devrais pas, mais j'éclate de rire. D'une table dans mon dos s'élèvent des propos indignés.
      Je me retourne, se sont des touristes, aux autres tables des italiens sourient...
      Je sens sur mon visage la même expression... Je m'intègre... Je m'intègre...


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C
Argh, le coup des clés à l'intérieur, celà m'est déjà arrivé sur ma voiture...quand mes enfants étaient petits et que je les sortais de la voiture, j'en profitais pour abaisser les petits loquets et fermer les portes jusqu'au jour où j'ai oublié d'extraire les clés du contact avant d'effectuer ma manipulation habituelle...Eh oui!Mais je n'ai pas eu la chance de trouver un bidouilleur de serrures mais un garagiste qui s'est empressé d'empocher le chèque de 300 frs (j'ai eu le vague sentiment d'avoir été arnaquée, mais bon...)<br /> Biz du Pays d'Auge<br /> Caro
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K
ha l'Italie... j'aime !
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A
Alain, je reconnais que je ne suis pas aussi assidu que toi quant à la parution des articles. Depuis quelques mois, je fait preuve d'infidélité à l'égard de mes amis (dont tu fais partie) du blog. Les circonstances de la vie et mes occupations font que je vous laisse un peu tomber. Néanmoins c'est toujours avec autant de plaisir que je me penche sur la toile pour voyager avec toi. J'espère que tes enfants vont bien et que le "toutou" coule des jours paisibles. Très amicalement. Alain
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C
Toujours des récits pleins de saveur ! Merci.
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T
Je pars à Venise avec mes élèves, du 31 mars au 04 avril ! Bon week-end Alain !
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